Les ateliers et les appels à création

Comment se fait-ce qu’à l’heure où les ordinateurs sont au centre de nos vies et que chacun d’eux a dans le ventre un logiciel de montage vidéo de base, nous n’enseignons pas dans les ateliers de réalisation classiques l’assemblage des images ? Alors qu’il est une étape cruciale dans la création d’un film, le montage est le parent pauvre de l’éducation à l’image. La pratique du mashup pourrait bien remédier à cela.

Le cinéma mashup alloue le temps de tournage à du temps de montage. Et la nature puzzle d’un film peut alors être mise en lumière.
De plus, le cinéma mashup est une manière « numérique » d’appréhender le monde. Il ne s’agit plus de partir d’une feuille blanche mais de réagir à partir d’une matière créée par d’autres : le travail arachnéen de tissage remplace le travail de fourmi. Quand on demande de construire un récit de film sur le papier ou à l’oral, certains restent interdits, notamment les jeunes nés avec l’informatique et internet. A partir du moment où on leur fournit de la matière image, des règles de montage de base et des exemples de réemploi, détournement dans des films mashups, ils se mettent à agencer les images à leur bon vouloir, à y apposer leurs mots et leurs musiques.
L’emprunt au cinéma permet à certaines personnes de s’assumer en tant que créateur alors même qu’elles ne se sentent pas « auteur ». Le mashup remet en cause le principe de l’immanence de la création qui empêche encore de nombreuses personnes de libérer leurs potentialités créatives. Emprunter les images des autres permet de ne pas aborder de front ses nœuds et tourments personnels. On s’autorise alors la prétention d’être un créateur. En cherchant bien, nous trouvons des emprunts qui entrent en résonance avec notre propre histoire … et celles du monde d’aujourd’hui. Dans cette surabondance, la meilleure manière de créer du sens, est-ce toujours de tourner de nouvelles images ou plutôt d’en mettre en lumière certaines déjà existantes et de les connecter entre-elles ?
La pratique du mashup a également une valeur patrimoniale. Elle fait découvrir des éléments de notre passé auxquels nous ne nous serions peut-être pas intéressés s’il ne s’était pas agi de le réactualiser par un mashup.
Le langage cinématographique change car nos cerveaux mutent. Ne fonctionnons-nous pas de plus en plus par « hypertextualisme », sautant d’un lien hypertext à un autre ? Internet nous fait creuser désormais à l’horizontal. Faire un atelier cinéma mashup, n’est-ce pas tout simplement préparer les gens au cinéma de demain ?A une forme plus instinctive de réalisation audiovisuelle ? Un geste cinématographique qui se rapprocherait de celui du peintre, du photographe ou du musicien de jazz ? Nous manipulerions les images avec nos mains sur un écran tactile ou une table mashup pour les assembler dans un élan créatif moins censuré par la raison.

 

LES PROGRAMMATIONS DE FILMS                               LES CONFERENCES DEBATS RENCONTRES